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Depuis le quartier-général de l’Empereur, à Troyes, le 25 février 1814…

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G.Peyrusse

Une lettre écrite par Guillaume Peyrusse, Payeur de l’Empereur, à son frère André.

« … Nous avons vu arriver hier au quartier-général de l’Empereur le prince Lichtenstein. Sa Majesté l’a vu, l’a laissé en conférence avec le major général [maréchal Berthier] et est partie pour marcher sur Troyes. On s’attendait que l’ennemi tiendrait devant la ville, qui elle-même est à l’abri d’un coup de main ; mais nous n’avons eu affaire qu’à une arrière-garde qui a tiré quelques coups de fusil et qui a évacué la ville. Le prince Lichtenstein est revenu pendant la nuit. Par une suite de cette mission, le village de Lusigny, à deux lieues d’ici, a été neutralisé, et des conférences se sont établies entre les généraux Flahaut pour la France, Toucas pour l’Autriche, Schouvaloff pour la Russie et……(sic) pour la Prusse. Elles durent encore et nous sommes encore ici. J’ignore ce qu’il ne résultera. Rien ne transpire. A la vérité il fait un froid excessif. Nous avons trouvé ici les proclamations les plus ridicules, la suppression des droits réunis, etc. ; les actions de ces messieurs ont bien démenti leurs paroles emmiellées. A notre approche, les paysans ont ressaisi leurs armes, et ont amené hier à mille à douze cents prisonniers. La veille on en avait fait pas mal et pris, je crois, quelques pièces de canon. Depuis trois jours, leur retraite était commencée. En arrivant ici, ils ne voulaient pas se pourvoir de soieries dont ils sont très amateurs, espérant les avoir meilleur marché à Paris ; en battant en retraite, ils ont jugé convenable de faire leurs emplettes ici. Ils se retirent pour nous attirer, disent-ils. Notre armée est animée d’un bon esprit. Sa Majesté a profité de cette faute et les a successivement rossés. Ils se sont retirés sur Bar-sur-Aube. Notre armée les suit; un certain camarade émigré amnistié a fait le joli cœur de porter la croix de Saint-Louis et de dîner chez les princes, etc. a notre arrivée, son affaire n’a pas été longue. On lui a lavé la tête avec du plomb.

Une certaine merveilleuse, Mme Bourgeois avait reçu l’empereur Alexandre, avait donné une soirée, enfin, après avoir reçu un cadeau de Sa Majesté, elle avait été conduite en pompe à Châtillon. Le pauvre mari a comparu devant Sa Majesté, qui, en plein salon de service, a tourné en ridicule la conduite de sa femme et lui a dit : « Que votre femme vous fasse cocu avec un de mes officiers d’ordonnance, à la bonne heure ! Mais que ces messieurs non contents de tout le mal qu’ils font à la France viennent encore foutre les femmes, c’est un peu fort ! Que votre femme rentre et que ce qu’elle a reçu soit versé à la commission des hospices, ou je vous envoie tous les deux à la Salpêtrière. »- « Oui, Sire » a dit le mari. Tu auras vu par le Moniteur que Reims a eu aussi son paquet. Cette ville ne risque rien de faire du pain d’épices pour payer ce à quoi l’on imposera pour sa complaisance envers des Cosaques qui n’ont d’humain que la figure… »

Guillaume.

(« Lettres inédites du baron Guillaume Peyrusse, écrites à son frère André pendant les campagnes de l’Empire. De 1809 à 1814… », Perrin et Cie, Libraires-Éditeurs, 1894, pp.186-188).

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