Une lettre de l’archichancelier Cambacérès adressée à Napoléon…
[Paris] 6 mars 1814.
Sire,
Aujourd’hui, d’assez bonne heure, Sa Majesté l’impératrice a daigné me faire savoir que votre Majesté lui annonçait, par sa lettre d’hier, écrite de Fismes qu’elle marchait sur Berry-au-Bac, après avoir délivré Reims, fait 4.000 prisonniers et pris 600 voitures de bagages. Je me suis empressé d’aller remercier et féliciter Sa Majesté l’Impératrice. Là, j’ai appris que le succès aurait été plus grand, si la ville de Soissons n’avait pas été rendue. Votre Majesté ayant écrit à 10 heures du matin, nous devons espérer ce soir un courrier qui annoncera de nouveaux avantages. En attendant, le canon a tiré sur le midi, ainsi que Votre Majesté l’avait prescrit. Ce signe d’allégresse publique n’a pu que produire de bons effets.
Notre satisfaction aurait été plus complète, si nous n’avions appris l’évacuation de Troyes, et que l’on se repliait sur Nogent. La fortune paraît nous sourire partout où est Votre Majesté : elle nous abandonne, Sire, là où vous n’êtes pas. Cela peut tenir aussi à d’autres motifs. On disait assez ouvertement que le mouvement rétrograde qui vient de s’opérer était le résultat d’un défaut d’accord et d’harmonie entre les ducs de Reggio [maréchal Oudinot] et de Tarente [maréchal Macdonald]
(Cambacérès, « Lettres inédites à Napoléon 1802-1814. Tome II. Avril 1808-Avril 1814. Présentation et notes par Jean Tulard », Editions Klincksieck, 1973, pp.1127-1128, lettre n° 1369).