Un bulletin de Beugnot, directeur général de la Police. Tout ce qui a un rapport direct ou non avec l’île d’Elbe attire l’attention de la police…
Bulletin du 20 août 1814. Paris. On avait répandu le bruit que le colonel Marin, de l’artillerie légère de l’ancienne garde, avait reçu cinquante mille francs de l’île d’Elbe. J’ai pris les renseignements les plus exacts sur un fait qui semblait d’abord étrange. Ce colonel a lui-même été interrogé à ce sujet, et a répondu avec un ton de franchise qui semble écarter tout soupçon. Un officier supérieur, nommé Marin, avait été porté, à Fontainebleau, sur la liste de veux qui devaient avoir une gratification de cinquante mille francs sur des fonds laissés à Bonaparte part suite de la convention conclue avec lui.
Il y avait un général et un colonel de ce nom : on ne savait trop lequel des deux était désigné pour la gratification. On en avait référé à Bonaparte qui a répondu, de l’île d’Elbe, que c’était le colonel. Celui-ci a fait part de cette décision à plusieurs de ses camarades : on en a sans doute conclu qu’il avait touché la somme. Il proteste qu’il n’a, jusqu’ici, rien touché et croit même que les autres inscrits sur la même liste n’en ont pas perçu davantage.
Le colonel Marin a déclaré qu’il avait servi Bonaparte avec zèle pendant qu’il était sous ses ordres ; il a proteste qu’il ne désirait que des occasions de montrer la même fidélité au Roi. Il existe à Paris un général Marin qui y demeure. Le colonel Marin dont il s’agit est à la veille de partir pour La Fère où il est établi avec sa femme et ses enfants. Il déclare qu’il n’a jamais eu de relations avec l’île d’Elbe.
(Source : Comte Beugnot, « Napoléon et la police sous la première Restauration. D’après les rapports du comte Beugnot au roi Louis XVIII. Annoté par Eugène Welvert », R. Roger et F. Chernoviz, Libraires-Éditeurs, sans date, p.146).