Accueil TEMOIGNAGES Une lettre de Foureau de Beauregard, médecin particulier de l’Empereur à l’île d’Elbe.

Une lettre de Foureau de Beauregard, médecin particulier de l’Empereur à l’île d’Elbe.

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Drapeau ile d'ElbeElle est adressée à un de ses amis, M. Lanlaud, juge de paix à Loudun.

Porto-Ferrajo [Portoferraio] , 5 juillet 1814.

Le traité du 11 avril [celui de Fontainebleau], outre qu’il conserve le titre d’empereur à Sa Majesté, celui de prince et de princesses aux personnes de sa famille, autorise à suivre Sa Majesté dans l’île d’Elbe les Français auxquels ce voyage conviendra, et nous conserve tous nos droits civils et politiques, comme citoyens français, à la charge pour nous de rentrer en France dans le délai de trois ans, à moins que, sur notre demande, le gouvernement français ne nous accorde la permission de prolonger notre séjour dans cette île. C’est sur la foi de ce traité que j’ai suivi Sa Majesté. Pour rien au monde, je n’aurais voulu renoncer au titre de Français. Je me suis réjoui de ce qu’un traité solennel, garanti par les quatre grandes  puissances alliées, m’ait permis de répondre à la confiance flatteuse dont l’Empereur m’a honoré à Fontainebleau, en me choisissant pour son premier médecin, et qu’il me continue ici, où je reçois chaque jour des preuves de sa bonté.

Je n’ai donc rien à désirer ici, si ce n’est la continuation de la tranquillité dont je jouis et que l’Empereur répand sur tout ce qui l’environne. Ceux qui s’acharnent à dénigrer un prince d’un si beau caractère, sont bien coupables. Il eût été bien plus noble, de leur part, de garder le silence. Ils ont une assez ample matière de louanges dans les vertus du nouveau souverain de la France.

Les gazettes ne se bornent pas à déchirer un grand homme qui a couvert la France de gloire et de monuments. Elles nous envient jusqu’à la satisfaction de savoir nos familles tranquilles sur notre compte. Tantôt elles parlent d’un tremblement de terre, tantôt d’une maladie pestilentielle qui, selon elles, détruit la population. Tout cela est d’une insigne fausseté. Jamais cette île n’a ressenti de secousses de tremblement de terre, et jamais il n’y a eu moins de maladies dans l’hôpital qui est à la fois celui de la garnison et celui  des bourgeois de toute l’île. Cet hôpital est sous mon inspection.

Ainsi, il est bon que tu saches que nous nous portons parfaitement et que l’Empereur surtout ne s’est jamais aussi bien porté. Tu sais que sa Majesté avait un teint basané en France. Eh bien, à présent, il a un teint riche de fraîcheur et de santé.

L’Empereur fait partout bénir son gouvernement. Il embellit la ville, il remplace des escaliers par des rues praticables aux voitures, fait exécuter  partout au dehors des routes dont l’ile manquait, entièrement, car tous les transports s’y faisaient à dos d’ânes et de petits chevaux. Dès ce moment, on peut se promener en calèche. A notre arrivée, il fallait faire le sacrifice de sa vie ou du moins de quelques membres quand nous montions à cheval pour suivre Sa Majesté dans ses courses.

A la vérité, nous manquons de presque tous les agréments que la société offre à Paris où les femmes sont si aimables ; mais avec le temps, les Italiennes nous dédommageront en partie.

(Arthur CHUQUET, « L’année 1814…», Fontemoing et Cie, 1914, pp.432-434).

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